Par Jean-François Ducharme – 20 août 2024
Tableau de Laurent de la Hyre (1606-1656) intitulé «La défaite des Anglais en l’ile de Ré par l’armée française le 8 novembre 1627.» Tableau conservé au musée de l’Armée, Paris
Benjamin Deruelle mène un projet de fouilles archéologiques sur l’île de Ré qui pourrait révéler les secrets d’un épisode oublié des guerres de Religion.
En 1627, 8000 soldats anglais débarquent à l’île de Ré, une petite île de 85 kilomètres carrés située sur la côte ouest de la France. Les troupes menées par le duc de Buckingham tentent de s’emparer de ce bastion stratégique afin de soutenir les protestants assiégés à La Rochelle – une ville portuaire française située en face de l’île de Ré –, qui se soulèvent contre la volonté du roi Louis XIII de rétablir le catholicisme dans tout le royaume. L’affrontement vire rapidement au désastre pour l’armée anglaise, qui doit battre en retraite dans les zones marécageuses de l’île. Les Français tueront entre 1200 et 3500 soldats anglais au cours de ce massacre, l’un des derniers épisodes des guerres de Religion.
Près de 400 ans plus tard, l’association Île de Ré Patrimoine, avec laquelle collabore le professeur du Département d’histoire Benjamin Deruelle, pense avoir identifié un site qui aurait été celui du massacre de 1627. «Avec l’aide de collègues spécialisés en archéologie et en histoire de l’art, nous avons croisé la documentation et les sources historiques avec les données sur le terrain, affirme le professeur. Nous ferons une demande de prospection cet automne. Si la demande est acceptée, les premières fouilles archéologiques auraient lieu à l’été 2025 et pourraient se poursuivre jusqu’en 2028.»
Conserver les vestiges
Si le projet de fouilles est accepté, Benjamin Deruelle a bon espoir de retrouver des vestiges de l’armée anglaise. «La bataille s’est déroulée dans des marais, qui sont réputés être de bons conservateurs des objets et des ossements, souligne le professeur. Habituellement, les corps des soldats sont enterrés dans des fosses communes, mais étant donné la nature des zones marécageuses, il est fort probable que des restes humains et matériels n’aient pas été récupérés.»
Pour le groupe de recherche, le scénario le plus probable consisterait à trouver du matériel de guerre – balles de plomb, boulets, épées, mousquets –, ce qui ouvrirait la voie à des études sur les armes utilisées lors des batailles du 17e siècle. «Dans le meilleur des cas, nous trouverions des restes humains, ce qui nous permettrait d’étudier les conditions de vie de l’époque: les pathologies, la façon dont les soldats étaient nourris, la nature de leurs blessures», mentionne Benjamin Deruelle.
En plus de combiner l’histoire, l’histoire de l’art et l’archéologie, ce projet comporte une dimension patrimoniale et touristique. L’association Île de Ré Patrimoine souhaiterait éventuellement ouvrir un centre d’interprétation de la bataille en exposant au public quelques découvertes réalisées lors des fouilles. «La dimension archéologique du projet m’excite beaucoup, se réjouit Benjamin Deruelle. L’archéologie des champs de bataille de l’époque moderne est une discipline balbutiante, et peu de chantiers de fouilles ont été menés jusqu’à maintenant. Je serais heureux de contribuer à ce développement.»
À la recherche de candidates et de candidats aux études supérieures
L’étudiant à la maîtrise en histoire Frédéric Auger collabore depuis près d’un an au projet de l’île de Ré avec son directeur Benjamin Deruelle. «Je suis toujours prêt à encadrer des étudiantes et des étudiants à la maîtrise ou au doctorat qui s’intéressent à l’histoire de l’Europe», souligne le professeur. Les candidates et candidats sont invités à contacter Benjamin Deruelle.